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Le balafon

audio & photos en cours

Textes, photos, audios © Patrick Kersalé

Le terme balafon est devenu une appellation générale pour désigner le xylophone, bien que chaque ethnie possède un mot spécifique désignant son propre instrument. Ce terme est une déformation du mot dioula balafola (joueur de bala). La vertu de cette page est de montrer un échantillonnage des xylophones du Burkina Faso. Les pages consacrées aux ethnies offrent parfois une approche plus approfondie.
 
Organologie du balafon
Le balafon est un lamellophone à lames de bois (xylophone). Il est classé parmi les idiophones. Il en existe une grande variété en Afrique subsaharienne. On en distingue deux types : ceux dont les lames sont libres et indépendantes les unes des autres sur leur support et ceux dont les lames sont fixes et liées les unes aux autres. Pour les balafons à lames libres, celles-ci peuvent être installées sur les jambes du musicien, sur des troncs de bananier, sur des bottes de paille ou sur des rondins rembourrés avec de l'herbe. Pour les balafons à lames fixes, celles-ci sont généralement posées ou suspendues sur un cadre avec ou sans résonateurs en calebasses. Au Burkina Faso, on trouve essentiellement des balafons sur cadre et des balafons sur fosse qui demeurent des instruments d'apprentissage et d'entraînement.

 

Le balafon sur cadre
Le balafon sur cadre est constitué de lames de bois montées sur un cadre formé de quatre montants auxquels sont attachées huit barres horizontales formant deux rectangles superposés ; l'ensemble est lié par des bandelettes de cuir torsadées. Des calebasses de forme sphérique, dont la partie supérieure est ouverte, sont suspendues sous les lames. Elles ont pour rôle d'amplifier le son produit par chaque lame. La taille de chacun de ces résonateurs est adaptée à la hauteur de chaque note. Les calebasses sont percées de plusieurs ouvertures circulaires sur lesquelles sont tendues de très fines toiles, formant à l'origine le cocon protecteur d’œufs d'araignée, ajoutant une certaine stridence à la sonorité. Pour permettre le logement de l'ensemble des calebasses à l'intérieur du cadre, celles-ci sont organisées en zigzag sur deux rangées, leur suspension étant assurée par des bandelettes de cuir. Les lames sont elles-mêmes suspendues au-dessus des résonateurs par deux lignes de bandelettes de cuir torsadées passant par deux nœuds de vibration. Chaque lame a une longueur, une largeur et une épaisseur propre. Les lames sont frappées par deux maillets terminés chacun par une boule formée d'une superposition de bandes de caoutchouc.
L’échelle des balafons sur cadre du Burkina Faso est tétratonique, pentatonique ou heptatonique. Elle est soit liée à la langue propre à chaque ethnie soit aux échelles des chants. Il existe de nombreuses variations au sein de chacune d'elles. Pour certaines ethnies, le balafon est un instrument d’emprunt.

Le jeu du balafon
Il existe deux manières de jouer le balafon. 
1. Le balafon reproduit les timbres et les tonalités du langage. (On appelle langue tonale, une langue faisant intervenir une notion de hauteur dans la prononciation des syllabes. Ainsi, un même mot prononcé à des hauteurs différentes aura des significations différentes).
Si le musicien joue et chante :

  • le balafon répète une phrase chantée,

  • le chant répète une phrase jouée, 

  • la même phrase est simultanément jouée et chantée. Dans ce cas, le jeu du balafon étant plus rapide que le débit des paroles, le musicien joue des phrases mélodiques de remplissage, chaque interprète ayant développé ses propres formules. Parfois, celles-ci peuvent être réduites à la répétition d'une note unique.

Si le musicien joue sans chanter : il s'exprime alors d'une manière codée par transposition des paroles sur le balafon.
2. Le balafon joue une mélodie accompagnant ou non un chant.

Les balafons sont joués seuls ou par paire, avec ou sans accompagnement d'autres instruments. Certaines pièces peuvent être jouées à deux, voire trois ou quatre balafonistes répartis de part et d’autre de l'instrument. Une ou deux lames du balafon sont, dans certains cas, rythmiquement frappées avec le manche d’un maillet ou des bâtons de bois. Les instrumentistes utilisent parfois des sonnailles métalliques portées aux poignets.

Apprentissage du balafon
Selon les ethnies, les balafonistes sont ou non des griots, musiciens professionnels de caste.
Dans de nombreuses ethnies, les jeunes s’initient sur un balafon sur fosse. Il s'agit d'un trou creusé dans le sol sur lequel repose des lames. Ceci tient au fait que les balafons sont souvent des instruments sacrés ne pouvant être sortis librement de leur remise.

Sacrifices
La sortie d'un balafon de sa remise nécessite, en fonction des circonstances, la pratique d’un sacrifice rituel : libation de bière de mil ou sacrifice d'un poulet sur le fétiche protecteur du balafon ou sur une partie de l'instrument, notamment la plus grosse calebasse résonateur censée héberger l'esprit protecteur. Ce sacrifice permet de recevoir l’accord des esprits pour utiliser le balafon et lui “donner de la voix”. De même, lorsque l'on a fabriqué un nouveau balafon, on procède à un sacrifice rituel prévu pour cette circonstance. On interroge le fétiche afin de connaître la nature et la quantité des sacrifices.

Cérémonies rituelles
Il est impossible d'énumérer toutes les cérémonies rituelles auxquelles est associé le balafon. Citons les plus représentatives : fêtes de réjouissances (mariage, circoncision, fin des récoltes...), obsèques, funérailles, encouragement des cultivateurs, cérémonies pour les fétiches...

Évolution de la pratique du balafon
Le jeu du balafon est codifié et diffère d’une ethnie à l’autre. De même, au sein d’une même ethnie, il peut exister plusieurs types de balafons joués en fonction de circonstances précises (fêtes, funérailles, rituels divers) avec un ensemble instrumental généralement immuable et un répertoire déterminé. Au Burkina Faso, le balafon prend un nouvel essor dans les villes notamment à Bobo-Dioulasso et en particulier dans le quartier de Bolomakoté, où il connaît depuis de nombreuses années, un renouveau au sein de formations regroupant des instruments traditionnels provenant de tout l'ex-empire mandingue (dundum, goni, jenbe, karijan, kesekese, jabara...).

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Xylophone siamou
En langue siamou, le xylophone est désigné par le terme ɲɛl (prononcer ñel).
Les Siamou utilisent trois types de ɲɛl :

  • semɛ̃ ɲɛl, littéralement “xylophone siamou” propre à cette ethnie. Il est joué dans toutes les cérémonies rituelles y compris les cérémonies secrètes. 

  • śa ɲɛl, littéralement “xylophone śa”, instrument emprunté l’ethnie Toussian (Tusjɛ̃) appelée a par les Siamou.

  • bɑm'bar ɲɛl, littéralement “xylophone bambara”, instrument emprunté à cette ethnie.

Ces deux derniers instruments sont joués au cours des fêtes de réjouissances.

L’instrument présenté ici est le bɑm'bar ɲɛl. Il est joué par paire : instruments soliste et accompagnement. Les deux sont doués de parole. Cependant, le soliste est le maître de cette parole. L'instrument d’accompagnement soutient le rythme par répétition de phrases constituées de seulement quelques notes, il reprend des messages lancés par le soliste.

Ce chant évoque le thème suivant : « L’oiseau n’a pas de sein mais Dieu fait vivre son enfant ».
L’ensemble est composé de deux bɑm'bar ɲɛl à 19 lames, de deux tambours cylindriques à deux peaux dundum, de deux tambours hémisphériques en calebasse bo, d’un tambour hémisphérique en argile ba bi, de deux cloches métalliques à battant externe kɛ̃gɛ̃. Les deux joueurs de ɲɛl portent des sonnailles métalliques aux poignets appelées sɛ̃sɛ̃.

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Xylophone birifor
Pièce interprétée lors des fêtes de réjouissances. Deux xylophones à 14 lames diulu, un solo et un accompagnement, lancent une phrase et la répètent plusieurs fois avant d’en énoncer une nouvelle. Le rythme est soutenu par un tambour cylindrique à deux peaux gɑ̃gar et un objet en fer kur (simple pièce de fer frappée avec un objet métallique).

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Xylophone gan

Nous avons consacré un chapitre spécial au balafon gan avec sa légende. Cliquez ici.

Le xylophone est (était) utilisé pour trois raisons chez les Gan :

  • au mois de décembre, au moment où le roi effectue ses récoltes.

  • pour annoncer officiellement le décès d’un prince, avant que le corps ne sorte de la maison.

  • lors des dernières funérailles (cérémonie ayant lieu une fois par an, destinée à éloigner les esprits des défunts rôdant autour des villages).

Les instruments d’accompagnement sont : le tambour cylindrique pɑ̃ɑgɑ et le tambour à variation de tension kɑ̃gõgo.

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Xylophone dagara
Ce chant est interprété lors des fêtes de réjouissances. Il est une sensibilisation au problème du SIDA. Il conte l’histoire d’une jeune fille de la ville de Gaoua, attendant un enfant de père inconnu, rejetée par la communauté villageoise. 

Le xylophone à 16 lames djil est accompagné du tambour cylindrique à deux peaux gɑ̃gar.

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Xylophone dyan

Le chõku à 15 lames est accompagné du tambour en sablier gɑ̃gõbu et du fer pwɛnpwɛnku.

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Xylophone siamou

Chant d’encouragement des cultivateurs lors des travaux champêtres.

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Xylophone lobi
Les Lobi connaissent trois types de xylophones : un xylophone de fête à 12 lames ou 14 lames (seulement 12 d’entre elles sont utilisées dans ce dernier cas), un xylophone de funérailles à 14 lames et, depuis quelques décennies, un xylophone spécifique à 14 lames pour le rituel du bir, dont il n’existe que quatre exemplaires en pays lobi.

La musique du bir est interprétée ici sur un xylophone de funérailles à 14 lames (jolõ buo). Deux interprètes sont nécessaires : un soliste et un “percussionniste” qui tient un rythme invariable sur deux lames du xylophone. Dans d’autres régions du pays lobi, cet accompagnement rythmique est joué sur deux petits tambours.

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